Para todas as mulheres
e,
principalmente,
para aquelas que me suportam.

Le pome de la femme
Marbre de Paros

Thophile GAUTIER (1811-1872)

Un jour, au doux rveur qui l’aime,
En train de montrer ses trsors,
Elle voulut lire un pome,
Le pome de son beau corps.

D’abord, superbe et triomphante
Elle vint en grand apparat,
Tranant avec des airs d’infante
Un flot de velours nacarat :

Telle qu’au rebord de sa loge
Elle brille aux Italiens,
Ecoutant passer son loge
Dans les chants des musiciens.

Ensuite, en sa verve d’artiste,
Laissant tomber l’pais velours,
Dans un nuage de batiste
Elle baucha ses fiers contours.

Glissant de l’paule la hanche,
La chemise aux plis nonchalants,
Comme une tourterelle blanche
Vint s’abattre sur ses pieds blancs.

Pour Apelle ou pour Clomne,
Elle semblait, marbre de chair,
En Vnus Anadyomne
Poser nue au bord de la mer.

De grosses perles de Venise
Roulaient au lieu de gouttes d’eau,
Grains laiteux qu’un rayon irise,
Sur le frais satin de sa peau.

Oh ! quelles ravissantes choses,
Dans sa divine nudit,
Avec les strophes de ses poses,
Chantait cet hymne de beaut !

Comme les flots baisant le sable
Sous la lune aux tremblants rayons,
Sa grce tait intarissable
En molles ondulations.

Mais bientt, lasse d’art antique,
De Phidias et de Vnus,
Dans une autre stance plastique
Elle groupe ses charmes nus.

Sur un tapis de Cachemire,
C’est la sultane du srail,
Riant au miroir qui l’admire
Avec un rire de corail ;

La Gorgienne indolente,
Avec son souple narguilh,
Etalant sa hanche opulente,
Un pied sous l’autre repli.

Et comme l’odalisque d’Ingres,
De ses reins cambrant les rondeurs,
En dpit des vertus malingres,
En dpit des maigres pudeurs !

Paresseuse odalisque, arrire !
Voici le tableau dans son jour,
Le diamant dans sa lumire ;
Voici la beaut dans l’amour !

Sa tte penche et se renverse ;
Haletante, dressant les seins,
Aux bras du rve qui la berce,
Elle tombe sur ses coussins.

Ses paupires battent des ailes
Sur leurs globes d’argent bruni,
Et l’on voit monter ses prunelles
Dans la nacre de l’infini.

D’un linceul de point d’Angleterre
Que l’on recouvre sa beaut :
L’extase l’a prise la terre ;
Elle est morte de volupt !

Que les violettes de Parme,
Au lieu des tristes fleurs des morts
O chaque perle est une larme,
Pleurent en bouquets sur son corps !

Et que mollement on la pose
Sur son lit, tombeau blanc et doux,
O le pote, la nuit close,
Ira prier deux genoux.